• Contre la loi spéciale du gouvernement Charest, qui encadre le droit de manifester des étudiants, les indignés du "printemps érable" sortent les casseroles. Ambiance.

    Ting ! Ting ! Ting !" L'invitation à se joindre au mouvement "Nos casseroles contre la loi spéciale !" s'est répandue au cours des derniers jours comme une traînée de poudre dans les réseaux sociaux, si bien que des dizaines de milliers d'indignés ont sorti au soir du mercredi 23 mai leurs ustensiles, puis ont tapé... fort. Des personnes de tous âges - des tout-petits en pyjama enfreignant leur couvre-feu sous l'œil complice de leurs parents aux mamies en bigoudis - s'en donnaient à cœur joie sur leur balcon ou dans la rue.    

    "On n'accepte pas, ce n'est pas compliqué !", a fait valoir Linda Jolicœur au cœur d'un attroupement de plus de 250 protestataires rassemblés à l'angle des rues Laurier et Fabre, à Montréal. La loi 78, dont le but est de "permettre aux étudiants de recevoir l'enseignement dispensé par les établissements de niveau postsecondaire qu'ils fréquentent", adoptée la semaine dernière par l'Assemblée nationale du Québec – à 68 voix pour et 48 voix contre, comme se plaît à le rappeler le premier ministre Jean Charest - restreint sévèrement les libertés de manifestations à leurs yeux. Mme Jolicœur juge la législation "trop sévère", "inutile"et "contribuant à amplifier la rage des gens". "Je suis sans mot devant l'attitude du gouvernement", a-t-elle ajouté tout en donnant des coups de cuiller de bois sur son ustensile de cuisson.

    A 20 heures tapantes, des milliers de personnes, comme Linda Jolicœur, sont sorties à l'extérieur tenant fermement une casserole et une cuillère n'attendant qu'un voisin fasse résonner les premières notes pour à leur tour entrechoquer leurs ustensiles. D'autres "casseroles" se sont agglutinées par dizaines à des intersections animées afin de faire entendre leur grogne à l'égard du gouvernement libéral, avant de mettre le cap vers la 30e manifestation nocturne contre la hausse des droits de scolarité dans le centre-ville.

    Du haut de ses six ans, Théo Pelletier et sa sœur cadette, Eve, ont aussi fait entendre leur mécontentement donnant consciencieusement des coups de cuiller sur leur bol. En milieu de soirée, ils se faisaient tranquillement à l'idée de se mettre au lit regardant avec envie des centaines de personnes défiler à proximité, dans la rue Masson. "Demain !", a promis papa.

    "Tapez sur vos casseroles avec toute la rage que cette loi spéciale fait naître en vous !", a lancé sur Facebook l'instigateur du mouvement de contestation, François-Olivier Chené. "J'ai lancé l'invitation sur Facebook dans la nuit du 17 mai au 18 mai au moment où il y avait les débats sur la loi spéciale. J'ai lancé la bouteille à la mer ne sachant pas qui allait répondre à l'appel", a-t-il expliqué.

    Quelque 1000 personnes étaient associées publiquement sur le réseau social au groupe lorsque les premiers coups de casserole ont été donnés le 18 mai à 20 heures. Hier, ils étaient dix fois, vingt fois plus à participer à la démonstration de force aux quatre coins de la métropole.

    M. Chené s'est dit "agréablement surpris"de l'engouement populaire suscité par son idée, mais du même souffle ne revendique pas le titre d'"organisateur"de ce tintamarre. "Ce n'est plus du tout de mon contrôle. J'ai lancé l'idée et tous ceux qui étaient intéressés l'ont reprise", a-t-il précisé. Le professeur de science politique a souligné le caractère "accessible"de cette action politique. "Ça permet à tous ceux qui ne veulent pas ou ne peuvent pas participer aux manifs nocturnes... Parfois, ce n'est pas rassurant de voir ce qui s'y passe."
     
    François-Olivier Chené s'est notamment inspiré des dissidents à la dictature chilienne, qui considérait tout regroupement de plus de quatre personnes comme des "attroupements illégaux". "Evidemment, nous ne vivons pas dans une dictature. Par contre, cette loi-là est un pas dans la mauvaise direction."

    S'ils étaient appelés à faire un maximum de bruit pendant un quart d'heure, plusieurs personnes ont tapé de la cuillère pendant plus de quatre heures à proximité de leur domicile, non sans susciter quelques soupirs d'exaspération de certains de leurs voisins. "Taper sur des casseroles pendant trois heures a un effet positif : c'est bien tripant. En revanche, les effets négatifs : [...] on dérange le voisinage, qui se met à nous détester en silence. [...] On attire la police. On attire la télévision TVA, qui mettra bien vite un micro sous le nez d'un enfant qui pleure et de sa mère paniquée", a souligné Luc Tremblay, sur la page Facebook du groupe avant le coup d'envoi du tintamarre d'hier.



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  • Un an après son apparition spontanée, le mouvement des "indignés" n'est pas mort, loin s'en faut. Il a donné naissance a une multitude d'initiatives populaires qui remplissent les vides laissés par le désengagement de l'Etat.

     

    Des indignés de la Puerta del Sol. Sur la pancarte: "J'en ai marre de payer pour des assiettes que je n'ai pas cassées". AFP PHOTO / Jaime Reina

    Des indignés de la Puerta del Sol. Sur la pancarte: "J'en ai marre de payer pour des assiettes que je n'ai pas cassées". AFP PHOTO / Jaime Reina

     

    Un lundi de juillet 2011, à Madrid. Comme toutes les semaines, une réunion du groupe de San Blas se tient à 18 heures. C'est l'une des assemblées locales d'"indignés" qui existent encore. Ce jour-là, une quarantaine de personnes étaient rassemblées à Plaza Blanca pour parler de la création d'une "banque du temps", un système permettant d'échanger des services entre voisins sans faire appel à l'argent. Israël, un informaticien, y a eu recours le jour même : il avait besoin de faire poser des rideaux chez lui. Dans l'assemblée se trouvait également Flori, une ancienne couturière de 56 ans. Ils ont trouvé un accord car elle aussi avait besoin de quelqu'un, pour jeter un œil à son ordinateur. Aujourd'hui, Sinergias Cooperativa San Blas est une coopérative qui compte trois plombiers, deux électriciens, huit professeurs, trois commerciaux, deux conducteurs, un couvreur, un ébéniste, un vendeur, deux gardiens d'immeuble, trois assembleurs et deux jardiniers.
    Depuis le soulèvement populaire du 15 mai 2011, une partie du mouvement dit du 15-M est passée de l'indignation à l'action. Les plus actifs ont continué à se réunir sur les places des villes et des villages, à organiser des assemblées et à partager leurs problèmes. Puis, en octobre dernier, date à laquelle le mouvement s'est étendu au monde entier, ils ont commencé à chercher des solutions. Mine de rien, le 15-M prend de plus en plus d'importance dans les quartiers. Chaque assemblée qui a lieu dans chaque quartier signifie que, chaque semaine, des personnes se réunissent pour trouver des solutions. Et tous ces cerveaux imaginent ensemble de nouvelles idées, de nouvelles initiatives.

    Têtes connectées

    Voilà comment fonctionne le 15-M : ce sont des milliers de têtes connectées, sur les places publiques et sur les réseaux sociaux, qui cherchent à sortir de la crise. Alors que l'Etat-providence disparaît précisément au moment où le patient a le plus besoin de lui, on entrevoit la naissance d'une économie parallèle, souterraine, alternative. Les temps sont durs : un quart de la population espagnole est au chômage.

    Grâce à ce mouvement , de nombreux réseaux de soutien ont vu le jour, comme le réseau d'assistance mutuelle du quartier madrilène d'Aluche : tous les jeudis et vendredis, cette association collecte le surplus des commerces et des restaurants, puis, le vendredi après-midi, elle distribue ces marchandises aux personnes du quartier qui en ont le plus besoin. Il existe aussi les initiatives du mouvement Rurales Enredaxs, qui tente de jeter des ponts entre les villes et les villages pour promouvoir la création de jardins écologiques, qui réduisent la dépendance alimentaire. On peut aussi évoquer les petits marchés de troc, comme celui qu'organise le groupe du quartier madrilène de Concepción (qui a également lancé un jardin écologique) : le dernier dimanche de chaque mois, les habitants vont au parc Calero pour échanger livres, jouets, vêtements et autres objets, sans recourir à l'argent.


    http://www.courrierinternational.com/article/2012/05/15/le-mouvement-du-15-mai-reveille-la-societe-civile


    indignés a travers le monde

      http://www.courrierinternational.com/dossier/2011/10/14/indignes-de-tous-les-pays

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